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LA VIE DE GALILEE, de Brecht


Commencée juste avant la Deuxième guerre mondiale, achevée, en Allemagne de l’Est au milieu des années cinquante, la pièce du grand dramaturge bavarois résonne sous les ors du Français, crépusculaire, porteuse de sens, vrai texte de théâtre pour le Théâtre.


Galilée, grand savant, homme de recherche et d’audace, végète dans son ménage, flanqué d’une femme épaisse et d’une fille rêvant de mariage. Dans sa lunette astronomique, il s’abandonne à la contemplation des astres, persuadé que la science officielle se trompe : et si la terre tournait autour du soleil ?


Pour faire connaitre ses travaux, il se rend à Florence, dans le palais des Médicis, où il espère se prévaloir d’un soutien. Mais les clercs veillent et il n’essuie qu’indifférence et suspicion.


Alors, parvient de Rome, une incroyable nouvelle : le Saint-Père souhaite le recevoir et valider sa découverte.


Heureux enfin, plein d’espoir, il tombe dans un piège tendu par l’Inquisition. Il doit, en fait, renier ses affirmations et subir un peu de torture, pour se bien rétracter, sous la benoîte régulation du pape qui demande qu’ « on lui montre seulement les instruments » !


De retour chez lui, apparemment brisé, soumis, il révèle qu’il travaille toujours secrètement et se prépare à la mort, en confiant ses travaux à un héritier. La lumière passe à un autre porteur de feu.


Texte admirable, et admirablement servi par la traduction inspirée d’Eloi Recoing, la pièce touche, sans manichéisme lourdaud, charge mesurée contre l’Eglise ou, plutôt, l’esprit clérical, révélant l’humanité souriante d’un savant jouisseur et confiant dans l’Homme. Hervé Pierre incarne Galilée, porté par son intuition et son talent, deux feux dévorants qui l’éclairent de l’intérieur, bouleversant et inoubliable. Alain Lenglet, incroyablement touchant, traverse la scène avec sa grâce douloureuse. Jérôme Pouly, formidable comédien, est un ami rêvé, délicat et dense tandis que Jérémy Lopez offre une des plus belles scènes du spectacle. Guillaume Gallienne, tout en retenue, joue un pape « progressiste » avec subtilité. Thierry Hancisse excelle dans le rôle inquiétant du Grand inquisiteur.


La mise en scène d’Eric Ruf est belle, traditionnelle dans le sens le moins étroit du terme, évoquant le geste de la caresse, au service de la troupe, avec les sublimes costumes de Lacroix, qui a dû voyager au XVIIème siècle. Quelle réussite !


Si vous n’êtes jamais venu au Français, si cela fait bien trop longtemps que vous le négligez, courez voir cette « Vie de Galilée » qui rend heureux, intelligent, comblé !


CL Morel


Comédie-Française, 1, place Colette, Paris Ier, M° Palais-Royal ou Pyramides. Location : 01 44 58 15 15. En alternance. Jusqu’au 21 juillet.


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