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BRULEZ-LA !, de Christian Siméon


Une nouvelle pièce de Christian Siméon, l’auteur à Molière du « Cabaret des hommes perdus », provoque frémissements, avidité, curiosité et appétit. Quoi encore ? L’épouse de Scott Fitzgerald, le blond et chic auteur de « Gatsby », se décompose depuis quelques années, vivante, dans un asile de fous de la Caroline du Nord. Enfermée dans une maison de poupées où gisent d’intruses vieilles marionnettes inanimées, elle se souvient de sa splendeur, de son prestige de jolie petite du Sud, de la rencontre avec son Grand homme, des nuits ivres de Paris, de tout ce drame annoncé et amorcé, telle une bombe. Elle a joué, beaucoup, séduit comme on respire, allumé les désirs, disposé, sous son bûcher, les feuilles vertes qui allaient sécher, avec le temps, pour faire craquer son feu. Tour à tour, écrivain, sous la désapprobation de Fitzgerald, ballerine, ensorceleuse de ses ennemis (drolatique scène avec Hemingway), folle, par complaisance, pour endosser un dernier rôle, elle mesure la chance qu’a eu la Duncan de finir étranglée par son étole, coincée dans une roue, promenade des Anglais. Son foulard à elle glisse plus doucement autour de son long cou, toute la vie qui lui reste hélas. Brillant dialogue avec le passé, la santé mentale, son amour des hommes, de la danse, « Brûlez-là » montre une autre Zelda Fitzgerald, invente un type de femme : la muse-maîtresse, amoureuse du genre humain, la monstresse de naissance, au museau innocent, sans complaisances ou fausse compassion sur son malheur supposé. Elle l’a tellement cherché ! Et si génialement...trouvé. Cette femme est un drame à allumer le soir tombé. Pour servir cette magnifique œuvre de Christian Siméon, rien de moins que le plus brillant homme de Théâtre de son temps, Michel Fau, (assisté de Jean-Philippe Marie) qui a conçu un cercueil de flammes, autour duquel Zelda vit, révèle, danse encore, avant de l’allumer. Claude Perron, l’émotion même, devient cette muse drôle et tragique, mutine, provocante, sûre de son pouvoir, poupée dansante en rupture de socle. Il faut aller voir la Perron, là, maintenant, en Zelda. Pour ne pas thésauriser un regret de plus. Auprès d’elle, Bertrand Schol, précieux, voyeur, glaçant, évoque efficacement le désinvolte et ambigu Scott le magnifique. Enfin, le décor d’Emmanuel Charles, saisissant, les lumières oniriques de Joël Fabing, les maquillages pour crépuscule de Pascale Fau et les costumes, beaux, de David Belugou, servent un texte d’exception, qui agit.

CL Morel

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