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LA LOCANDIERA, de Goldoni


Le Molière italien est à l’affiche du Français, avec sa fameuse « Locandiera », jouée et rejouée depuis trois siècles.


Dans une pension, la tenancière, Mirandolina, choie sa clientèle masculine qui soupire d’amour. Parmi les assidus, il y a le Comte, Albaforita, prodigue et protecteur, qui espère un retour d’investissement, et le Marquis, Forlipopoli, figure ridicule et désargentée de la noblesse crottée. Seul, démuni, sans espoir, le serviteur, Fabrizio, convoite aussi le cœur de la belle tenancière.


Lorsqu’arrive un chevalier dédaigneux du beau sexe, Ripafratta, il pique la curiosité de Mirandolina, qui œuvre alors à sa « conversion ». Tous les moyens sont bons. Le succès de son entreprise décevra la jeune femme qui, une fois la leçon donnée, pensera à s’établir avec celui qui la veut vraiment, sans artifices : Fabrizio. Chacun rentre dans son monde. Une fois la révolution achevée…


La mise en scène très classique d’Alain Françon, juste, rigoureuse, donne une tonalité très française à ce chef d’œuvre italien, qui y perd un peu de sa couleur et de sa fantaisie locales.


N’en déplaise aux idéologues, la pièce de Goldoni n’est pas une charge anti-masculine, mais une farce subtile qui égratigne la noblesse et les puissants pour montrer la sagesse profonde et naturelle du peuple, que l’on peut traiter mal, mais qui garde néanmoins sa dignité farouche. C’est en cela qu’elle est corrosive : Mirandolina, c’est le peuple, et il n’est pas abaissé.


Florence Viala est une magnifique Locandiera, à la féminité majestueuse, drôle, émouvante, consciente, face à ses séducteurs, truculent Hervé Pierre et pathétique don-quichotterie d’un Michel Vuillermoz au zénith, tandis que Stéphane Varupenne incarne un misanthrope chevalier, faussement incorruptible, effrayé devant la Femme, et que Laurent Stocker nous enchante dans sa composition d’un valet d’auberge, ravagé d’amour et écrasé par la fatalité de sa condition. A remarquer, également, Noam Morgensztern, irrésistible en serviteur du chevalier.


La traduction de Myriam Tanant ne déçoit guère et cette Locandiera touche le cœur, probable grand succès des mois à venir.


Christian-Luc Morel

Comédie-Française, 1, place Colette, Paris Ier, métro : Palais-Royal ou Pyramides. Location : 01 44 58 15 15. En alternance. Jusqu’au 10 février 2019.


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